Comprendre la relation antagoniste entre les forêts tropicales et l’agriculture

par isi cavalletti 5 Sep 2019

Les forêts tropicales sont de vieux écosystèmes. Certains sont vieux de plus de 120 millions d’années. Pourtant, ils sont ravagés et incendiés dans le monde entier plus particulièrement en Indonésie, au Brésil, dans le bassin du Congo et à Madagascar. Abritant 20% des espèces mondiales, ces jungles sacrées constituent le berceau de la nature et de la biodiversité. Alors pourquoi un tel carnage?

Capture d’écran d’imagerie satellite des incendies – 28-08-2019 fournie par FIRMS (Informations sur les incendies pour le système de gestion des ressources – Fire Information for Resource Management System) de la NASA.

Un signe que nous commençons l’Anthropocène

 Photo prise par Charlie Hamilton James à Maranhao, au Brésil, en 2017

Avec plus de 7 milliards d’habitants sur la Terre, nous avons commencé à modifier d’énormes pans de la nature, à altérer les climats et les cycles naturels pour satisfaire les besoins de notre espèce. Notre système fondé sur la notion de croissance constante dégrade la nature, ce qui encourage les exportations au-delà des besoins locaux. A titre d’exemple, pour participer au commerce mondial, l’Indonésie a cédé la plus vieille forêt tropicale du monde en échange des profits de la production de l’huile de palme. Pour devenir le premier exportateur mondial de viande de bœuf, le Brésil a partiellement vendu l’Amazonie. En tant que consommateur nous sommes tous responsables.

En Afrique tropicale

La cause de la déforestation et des incendies dans cette région est particulière. Contrairement aux pays d’Asie du Sud Est et au Brésil, la plupart des pays africains sont toujours d’importants importateurs de produits alimentaires. Néanmoins, une population en croissance et l’impératif d’autosuffisance alimentaire couplé à des traditions anciennes posent un certain nombre de problèmes environnementaux.

La déforestation

L’Angola, le Congo et Madagascar, qui ont eu cette année trois fois plus d’incendies que le Brésil, utilisent encore une méthode connue sous le nom de culture itinérante (aussi appelée culture sur brûlis). Dans chaque pays, la méthode et la tradition diffèrent, mais suivent des caractéristiques similaires:

«Une zone de forêt est défrichée, les débris brûlés et les terres cultivées pendant quelques années, puis on laisse repousser la forêt ou une autre végétation secondaire avant de la défrichée de nouveau et de réutiliser ce terrain.» (FAO)

Dans les trois pays cités, les forêts sont défrichées pour l’agriculture de subsistance et à petite échelle. Au Congo, cela représentait 84% de la déforestation entre 2000 et 2014, tandis que l’agriculture commerciale ne représentait que 1% de la déforestation. Le gouvernement n’intervient ni ne s’émeut de la destruction de la superficie forestière, mais pour le monde entier, ces pertes sont dévastatrices.

  Déforestation dans le bassin du Congo – Ben Stirton – Getty Images

Pendant des générations, les incendies d’agriculteurs n’étaient pas un sujet de préoccupation en Afrique car ils sont restés principalement dans les savanes et les broussailles. Cependant, à mesure que l’activité agricole augmentait, la méthode de culture itinérante s’étendait des zones forestières aux parcs nationaux.  Sa pratique implique également que tous les deux ans, de nouveaux domaines doivent être détruits. C’est une méthode non durable pour les forêts tropicales, car elles mettent des millions d’années à se former.

De manière assez tragique chaque pays considère cette méthode comme un phénomène normal car ancré dans les coutumes. Chaque été, les forêts sont incendiées et, dès septembre, les premières pluies tropicales devraient, en principe, éteindre ces incendies. Cependant, les gouvernements ne réalisent pas que la hausse des températures et la diminution des précipitations dues au changement climatique pourraient entraîner une recrudescence des incendies.

Il est difficile d’évaluer la complexité de la modification de ces méthodes traditionnelles, mais ce n’est pas impossible. L’agriculture régénérative peut augmenter les rendements, fournir un sol fertile et en même temps capter le carbone. La connaissance et l’éducation sont les meilleurs atouts de l’homme contre ce fléaux. Si l’agriculture régénérative était appliquée en Afrique tropicale, la culture sur brûlis pourrait appartenir au passé et la conservation de la forêt tropicale pourrait orienter les profits vers le tourisme durable. Cela reste toutefois utopique pour l’instant.

Isi Cavalletti

Article publié originalement en anglais sur eco-nnect.com

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